Saintélyon par Patrick Février

« Sortir de sa zone de confort » est une expression qui revient souvent dans le monde sportif. Dès lors que l’on veut progresser, pas d’autre choix que de se faire violence, quel que soit notre niveau, et quels que soient nos objectifs…

Cette SaintéLyon 2017 n’était pas à mon programme. Je m’y suis inscrit le lendemain de mon retour de la Réunion, « à cause » de mon arrêt pour hypothermie après 77 kilomètres de course sur la Diag’. Puisque les conditions y sont généralement difficiles et les températures plutôt fraîches, ça allait être l’occasion pour moi de régler ce « truc » contre le froid.

Si j’avais su !

Les jours qui ont précédé la course ont été l’occasion de nombreux commentaires très drôles, puisque les gens qui me connaissent bien savent qu’en dessous de 15°, j’ai froid ! Alors quand les prévisions météo pour la nuit de la course ont été annoncées (-8°, donc du environ -15° en ressenti, donc du -25° en ressenti pour moi), j’ai vraiment commencé à flipper. Pour de vrai. Pas spécialement peur du kilométrage, ni du dénivelé, mais du thermomètre, là oui !

Sans doute avais-je au départ l’un des plus gros sacs sur le dos, mais j’avais prévu de me changer entièrement à Sainte-Catherine (28ème km) et à Soucieu (52ème km). Malgré cette vraie bonne idée, j’ai tremblé de froid du début à la fin. Le froid annoncé était bien là, tout comme la neige et le vent glacial. Avec en invitées surprises de nombreuses portions complètement verglacées, lesquelles ont fait pas mal de dégâts…

Je suis allé au-delà, très au-delà même, de ma zone de confort.
Mais la notion de plaisir ? Quasi inexistante ! Et cela prête bien sûr à réflexion, et à décisions !

Ma course ? J’avais fais le choix de partir prudemment, contrairement à mes mauvaises habitudes. De toute façon, vue la température ambiante et l’état de lequel je me trouvais, pas vraiment d’autre choix ! Très vite, les premières foulées dans la neige. Pause de 15’ au premier ravito, le temps de boire deux verres de thé chaud. J’étais littéralement frigorifié en arrivant à Sainte-Catherine. Mais à aucun moment je n’ai songé à mettre fin au calvaire que j’étais en train de vivre. Il y a quand même dans la vie des moments où l’on se demande « ce qu’on fout là » ! Sous le regard amusé de quelques coureurs, j’ai sorti de mon sac mes fringues sèches et bien rangées, et suis devenu en l’espace de quelques minutes un autre homme, qui n’avait (presque) plus froid ! Pas loin d’une demi-heure d’arrêt, mais qu’importe le chrono, l’essentiel était bien ailleurs !

Après avoir bu plusieurs soupes, il était temps de repartir.
Après quelques secondes dehors, j’étais à nouveau complètement frigorifié !

Même pas mal, tu te tais, tu souffres en silence, et tu avances ! Motivation quand tu nous tiens ! Pour qui, pourquoi ? Dans ces instants, pas de réponse !

La descente vers Saint-Genou / Chaussan aura été pour beaucoup la partie la plus compliquée de la course. Une descente verglacée, avec, surprise, de nombreux traileurs équipés de chaussures de route (!), et c’est un festival de chutes auquel nous avons assisté ! Pour ma part, deux belles glissades sans gravité, malgré mes Speedgoat 2 et leur super accroche sur tout le parcours. Je n’avais à ce moment qu’une seule hâte, arriver au plus vite à Soucieu-en-Jarrest pour me (re)changer !

Soucieu-en-Jarrest, là où j’avais l’an dernier été contraint à l’abandon, pour hypothermie. J’y ai cette fois pris mon temps. Une pause, une longue pause de plus de 30’. Et un nouveau départ, pour les 20 kilomètres me séparant de Lyon. En dépit de mes vêtements secs, tout comme après Sainte-Catherine, je me suis retrouvé transi de froid très rapidement. Trop rapidement. Il y a eu ce moment où je n’ai plus senti mes doigts, malgré mes gants, ce moment durant lequel je me suis vu devoir être… amputé ! Bien sûr, après coup, ça semble disproportionné comme réaction, mais sur le coup, j’ai vraiment eu peur ! L’effet Kiss Cool pas cool du froid !

5 kilomètres avant d’arriver à la Halle Tony Garnier à Lyon, il y a une jolie surprise pour tous les participants, une longue montée interminable sur route suivie d’une belle descente d’escalier pendant laquelle les adducteurs sont soumis à rude épreuve.

Je suis finisher de cette SaintéLyon disputée dans des conditions dantesques, mais je suis surtout très heureux d’avoir bravé le froid et d’avoir été bien au-delà de mes limites. Alors oui finisher, mais c’est le seul point positif que je retiendrai de la course. J’en ai trop bavé, pour ne pas dire autre chose, pour apprécier quoi que ce soit d’autre. Le temps ne me fera pas changer d’avis. J’ai définitivement pris conscience que courir dans ces conditions, ce n’est tout simplement pas fait pour moi ! A J+1, je me sens fatigué comme je ne l’ai jamais été à l’issue d’un trail, et je me dois, pour une fois à chaud, d’en tirer les conséquences.

Je vais revoir tous mes objectifs pour la suite de la saison, sans doute annuler ma participation à certains rendez-vous de l’hiver et du printemps, et revenir à la raison dans la rédaction de mon programme.

Sylvain and Jo, c’était cool de faire la route en votre compagnie, et je suis content de vous avoir ramené à bon port malgré mon état de fatigue avancé au volant ! Encore bravo pour votre course ! Cyril, bravo à toi d’avoir tenté ce pari un peu fou d’un premier 70 bornes sur la SaintéLyon ! Tu auras ta revanche, c’est certain !

Pour conclure, sachez que j’ai plus qu’apprécié la lecture de vos messages d’encouragements, jusqu’au milieu de la nuit pour certains, et de félicitations à l’issue de la course ! Je vous remercie toutes et tous du fond du cœur ! Mentions spéciales à Antoine pour tes superbes montages photos que j’ai vraiment adoré et qui nous ont bien fait marrer, ainsi qu’à Joël, Alain, et Frédéric, mes trois camarades du PNRT, les trois autres « mousquetons », qui eux étaient allés au bout de la Diag’ il y a quelques semaines, et dont les messages de soutien m’ont embrumé les yeux !